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Rue Maginot, une petite nouvelle.

Updated: Sep 15

Rue Maginot

Princesse F.

Bourg-en-Bresse, 23 aout 2023



Je marchais dans la ville, lorsqu’au bout de la rue, j’aperçus un homme courir à petits pas. Le vieux monsieur tentait de récupérer son chapeau. Un vent rare de canicule propulsa son couvre tête sur la voie. L' exaspération se lisait dans les yeux des automobilistes au feu rouge. Je courus vers lui dans le sens inverse. Il prit le chapeau de paille dans une main, non sans peine, releva les yeux, esquissa un sourire et baissa la tête en signe de gratitude :


- Un peu tard mais je t’ai vu, merci beaucoup.


- Je suis désolé.e, je n’ai pas pu...

Vous avez été rapide.


- Ah non... Merci, je t’ai vu.


Gênée, je pris soin de laisser un sourire timide en pressant le pas. J’étais poussée par le vent chaud, il fallait rentrer au plus vite, les trente-cinq degrés annoncés ne me laissaient pas indifférent.e. Malgré mes talons tournés, Je ressentais quelques hésitations de sa part. Vous savez ? cette sensation particulière et inexplicable. Un poids, une ombre. Comme lorsqu'une personne un peu louche vous suit dans les rues, tard le soir. Après soixante-dix ans, personne ne vous parle. On vous évite. On sait, vos conversations tournent autour du passé. La jeunesse pense au futur, elle est obsédée par le futur, taclée par une pression de survit, remplie de peur.

Dans ses élans, Il me rattrapa :


- Vous venez d’où ?


En France, on a cette tendance naturelle, souvent agaçante, de demander les origines ethniques et culturelles. Je répondis malgré moi :


- Du Cameroun et vous ?


- De l’Algérie, j’espère que ça va chez vous.


A ce moment précis, je portai une attention méticuleuse, pour mieux voir à qui je parlais et si je devais m’enfuir. Il était grand, mince, les dents abimées et un visage aimable. Il portait un autre chapeau, plus petit, un Kufi, symbole de sagesse. Le vieux monsieur tenait sa canne dans une main, son chapeau de paille dans l’autre. Mes mots sont tombés avec une telle facilité :


- Oui, mais c'est compliqué, vous savez.

Il y’avait là, une compréhension et une complicité entre deux inconnus. Avions-nous déjà échangé auparavant ? Non...C’était la première fois que je le rencontrais.


- Je suis venu d’Algérie à 17 ans et j’ai 80 ans, Al Hamdulilah ! Ils nous ont laissé tranquille... Al Hamdulilah ! Ils nous regardent encore. Quand est-ce qu’ils vont nous laisser ? Hein ? Quand ?


Je balbutiais et acquiesçai sous un sourire maigre. Pendant quelques secondes, il contemplait mes tatouages. Un sentiment étrange, une sorte de foudre avait parcouru mon abdomen. A ma grande surprise, Il ne fit rien, aucun jugement ou changement dans son comportement.


- Bon, je ne veux pas vous déranger...


Il remit le chapeau de paille laissant paraitre la beauté de ses lunettes parfaitement rondes. Puis, il se retourna :


- Avez-vous vu ce qui se passe au Mali ? et Poutine ? Qu’ils nous laissent tranquilles !


- Oui, mais...vous savez, je garde la foi, ça va aller.


- Al Hamdulilah ! je suis aussi croyant, je crois en la jeunesse. Eh, bien...

Il me tendit la main, en concluant :


- Eh bien... Enchanté, je vous laisse.


- Merci, enchanté.e...euh...Aurevoir


Nous avons marché chacun.e, dans une direction opposée. Sur le chemin du retour, ses mots résonnaient encore, mes pensées vacillaient.


En ouvrant la porte, le cœur épris par cette petite rencontre inattendue,

Un bruit, une notification :

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Princesse F.

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